mercredi 17 juin 2020

LE SILENCE DE PARIS DANS L’APHASIE DU MONDE


N’avez-vous pas entendu que ces jours-ci le silence avait disparu, et que les oiseaux, au matin, ne chantaient plus. Je ne suis pas de ceux qui croient aux causeries le long des berges, mais le silence est quand même l’âme des choses. Il guérit des longues névroses, de la rancune et du regret. Nous parlons de ré-ouverture à la vie, mais finalement, nous retournons à la mort. Car, où est passé la lune, le soir, et ses rayons discrets qui frémissent dans les arbres moroses ? Où est le ciel étoilé en plein Paris que la pollution masque de sa lourde prairie noire qui survole la ville dans un silence sans fin ?

Le silence descendait, en nous, mi-voilé et doux comme un cœur en sourdine, et dans l’aphasie du monde, sous la peau blanche de tes épaules nues, j’entends encore tes petits gémissements de plaisir qui augment à chaque contraction de mes hanches, pour finir dans un cri que personne ne peut manquer dans cette pause du monde qui procure désir et que la mémoire des cloisons fait gémir encore. La lampe douce installée pour la circonstance qui se consume, l’odeur des roses qui nous parfument, et nous là, confinés en écoutant le silence du temps qui bat sa petite enclume, jusqu’au bruit de la bouilloire qui siffle pour rompre le confinement, et reprendre le chemin, dit normal, de notre vie.

L’instant de l’arrêt était sublime ; un petit moment d’égarement et d’introspection, un délice plus grand que l’odeur du miel qui brûle sur les jambes des femmes byzantines au salon de beauté, mélange de caramel et de miel qui asticote nos papilles, et qui met un point final à la liberté. Voici de nouveau la maîtrise de l’univers qui s’exprime : peut-être un bien pour un mal ou un mal pour un bien. Qui sait ?

Anonymode