vendredi 4 avril 2025

LE LUXE NOUS FAIT LES POCHES

C’est ce miracle de la mode qui nous permet de transporter notre vie sans ressembler à la mule de Jean de Florette. En théorie, elles sont là pour le côté pratique, mais elles sont devenues un festival de multiplicité. Plaquées, zippées, boutonnées, et aussi certaines comme des cachettes si discrètes qu’on pourrait y cacher un lingot sous un logo, sans jamais le retrouver.

Si autrefois, une poche était une simple ouverture dans le tissu, aujourd’hui, c’est un manifeste de survie. Parce qu’en période d’incertitude, rien ne rassure plus que de savoir qu’on peut emporter son gel hydroalcoolique, ses biscuits de survie et, soyons honnêtes, son anxiété dans un recoin de sa veste. La fente est de retour et je ne parle pas des Bimbos de supermarché.

Les signes avant-coureurs de cette frénésie de la poche ne datent pas d’hier. Les pantalons cargo, jadis réservés aux plombiers du dimanche et aux explorateurs de parkings souterrains, ont refait surface avec une insistance quasi-militaire. Coperni, avec une délicatesse proche de l’obsession, a collé des poches sur tout ce qui bouge pour sa collection Pre-Fall 2025. Quant à Courrèges, les sacs bandoulières ne suffisaient plus, et ils ont donc ajouté des harnais multifonctions pour transporter votre veste ou, soyons fous, un casque de moto.

Lors de la dernière Fashion Week, les podiums parisiens se sont transformés en un hommage à la poche sous toutes ses formes. Off-White, dans une quête de fonctionnalité absolue, a même doté des talons aiguilles de compartiments pour stylos et supports de téléphone. Dior, dans un élan d’élégance pragmatique, a joué avec la dentelle et la mousseline de soie pour des poches subtiles, prouvant ainsi que même le raffinement pouvait se prêter au rangement.

Mais, ce déluge de poches n’est pas seulement une lubie stylistique. C’est un cri du cœur des marques qui ont compris que leur public ne veut plus uniquement être beau, mais être prêt à tout. La frime pure et dure ne suffit plus ; le luxe doit travailler autant que ceux qui le portent. Surtout quand les consommateurs, en 2025, se serrent la ceinture plus que jamais, et réfléchissent à deux fois avant de jeter leur argent dans des fringues purement décoratives.

Le message est clair : fini le superflu, place à l’utile. Mais, rassurez-vous, il est toujours possible d’être chic tout en ayant de quoi stocker une carte de crédit. Le glamour utilitaire est là, et cette saison, il a plus d’un tour dans sa poche.

FM